Pascal Bardet, ancien chef du restaurant triplement étoilé Le Louis XV - Alain Ducasse à Monaco, est revenu aux sources en s'installant à Saint-Médard (Lot) en 2013. Quatre ans plus tard, il a décroché une deuxième étoile au guide Michelin, une première dans l'histoire gastronomique du département. Retour sur cette année particulière.
L' activité du restaurant
"Nous évoluons d’année en année, mais la deuxième étoile a été un accélérateur indéniable. On voit aujourd'hui des personnes qui ne se déplacent que par le biais du Michelin, notamment des étrangers qui vivent plusieurs mois en France ou séjournent au Relais & Châteaux voisin. Les conséquence n'ont pas été immédiates, ça a vraiment commencé à bouger à la fin du printemps 2017 (le palmarès Michelin a été dévoilé début février, ndlr). Aujourd'hui, cela apporte un vrai confort de travail. Cet été, nous étions souvent complet, avec 35-40 couverts. C'est plus simple pour nous de faire 35 couverts de façon linéaire, que de devoir faire comme avant des services à 50 entrecoupés de services plus modestes. Concernant les 20% d'augmentation de chiffre d'affaire généralement évoqués pour une deuxième étoile, je n'en suis pas convaincu. Nous ne sommes pas à Paris. Les prix, eux, ne vont pas bouger. En fait, une semaine avant l'annonce du Michelin, nous avions augmenté les menus de deux euros. Ce qui me fait plaisir, c'est que malgré la deuxième étoile, personne n'a eu peur. Les gens qui cassent leur tirelire une fois l'an an pour s'attabler au Gindreau viennent encore."
L'équipe
"Vous m'appelez si vous trouvez aujourd'hui un restaurateur en région, même étoilé, qui reçoit une montagne de CV (rires). Par rapport à mon prédécesseur (le chef étoilé Alexis Pelissou), nous sommes quelques-uns en plus, mais ce n'est pas lié à la deuxième étoile. C'est lié à notre envie globale d'évolution."
La cuisine
"Je n’ai jamais parlé de la première étoile à mon équipe mais je flippais de ne pas l’avoir car la maison l’avait déjà avant qu'on la prenne en main. La deuxième a été une vraie surprise. Pendant quelques jours j’ai été crispé car ce n’était pas prévu. Mes phrases commençaient par "maintenant il faut que" et l'équipe m'emboîtait le pas. Un soir, je regardais les gars bosser et j’ai dit à ma femme : "Je comprends pas on vient d’avoir une super récompense et ils sont tendus". "C'est normal, ils sont comme toi", m'a-t-elle répondu. J'ai gardé en tête ces paroles du Michelin à l'annonce de la deuxième étoile : "On vous récompense pour ce que vous avez fait et pas ce que vous allez faire." Alors on a continué sur notre lancée. Aujourd'hui je vais bien. Mentalement, l’étoile te rappelle que tu fais du bon travail, qu’il faut persévérer. Je continue à m'écouter et à me faire confiance. Si j'ai envie de proposer un plat rustique qui me parle, je n'hésite pas à le faire."
Les fournisseurs
"Il y a eu du changement par rapport au producteurs hors territoire, qui viennent maintenant nous voir en direct. C'est très bien, car si je privilégie le local, j'aime ratisser large et travailler certains produits que je n'ai pas à porter de main. J’ai lancé récemment un appel à une association qui réunit des producteurs en biodynamie dans le Lot, pour que ses adhérents viennent me voir. Ce sont des très bons faiseurs, pas forcément des bons commerciaux."
Les investissements
"Nous investissons en permanence et là encore, ce n'est pas lié à l'obtention d'une deuxième étoile Michelin. De la vaisselle est en commande. Les lustres et les nappages ont été changés récemment. Il y a deux ans, on a refait la partie production cuisine. L'espace accueil va être totalement repensé. Tout ça, on l'aurait fait avec ou sans la deuxième étoile, qui apporte indéniablement du confort au niveau de l'investissement."
La communication, les médias et les partenariats
"On a passé une année 2017 incroyable sur ce plan. M6 a tourné un reportage sur la truffe avec moi, qui est sorti la semaine de la deuxième étoile. Il y a aussi eu France 3, le magazine Trois Etoiles, Le Figaro, Le Point, L'Express. La retombée presse est bénéfique pour la maison et elle fait extrêmement plaisir aux équipes. Concernant les propositions de relations presse, je les compte sur les doigts d’une main. Sur ce plan, on réfléchira dans 5 ans. Je n'irai pas plus vite que ce qu'on est capable d'assumer. Je fais un peu de représentation mais cela reste local : la semaine prochaine je vais faire un cours de cuisine pour la fête de la truffe à Lalbenque et j'ai aidé un voisin vigneron qui créé son chais. Par contre, je n'ai signé aucun contrat en dehors de celui que j'ai avec mon épouse (rire) ! "
[divider]Auteurs[/divider]
Propos recueillis par Louis Jeudi / ©Le Gindreau
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